Identifiée principalement par son activité de diffusion, logiquement la plus médiatisée puisque directement destinée au public, l'association Vidéochroniques s'est engagée depuis 1997 dans un travail d'accompagnement des artistes au stade de la production des œuvres, par la mise en place d'un atelier de création et d'un programme de résidences. Malgré la discrétion de ce dispositif, sa réalisation a profondément modifié la perception des actions conduites par la structure, depuis lors explicitement associée au champ de la création.

C'est à travers ce programme que Vidéochroniques a choisi de contribuer à la manifestation organisée par Aflam, "Cinéma(s) de Palestine", en invitant l'artiste Wafaa Yasin pour une résidence d'une durée d'un mois (du 13 mai au 9 juin 2008), au cours de laquelle un ensemble de moyens techniques et humains seront mis à sa disposition. La mise à profit de ce dispositif singulier nous est apparue opportune car complémentaire des propositions fournies par les autres partenaires de la manifestation. En plus de son utilité pour l'artiste, cette démarche est pour l'association un moyen concret de se familiariser avec la création artistique issue de territoires qui n'ont pas encore fait l'objet de recherches approfondies de sa part.


© Wafaa Yasin, extrait de la vidéo Ice and Salt, 2005

Wafaa Yasin est née à Tamra (ville arabe israélienne située dans le Nord-Ouest du pays) en 1980, elle vit à Beit Safafa, village voisin de Jérusalem. Elle dispense actuellement des cours d'art moderne à la fondation Al Mamal (Jérusalem) et s'implique, parrallèlement, dans des actions à caractère social au camp de réfugiés de Shufat.

Le travail qu'elle développe (sous la forme d'installations, de sculptures, de dessins, de photographies, de vidéos...) est dominé par la figure de la mort ; il se présente généralement comme la tentative de greffer ou de souder des éléments artificiellement et violemment dissociés, comme des morceaux de corps qui auraient été arrachés, démembrés, amputés ; il aborde les notions d'homogénéité et d'hétérogénéité, d'unité et de diversité, d'harmonie et de discordance, d'uniformité et de pluralité... Les rituels qu'elle met en scène dans ses vidéos lui permettent justement de révéler et d'accentuer diverses images de la différence.

Outre la familiarité formelle qui lie le travail de Wafaa Yasin et les parti-pris de Vidéochroniques (la dimension performative du projet, son caractère multimédiatique), c'est l'argument de son contenu qui a conduit l'association à se rapprocher de l'artiste : ancré dans un contexte tout à fait singulier, il est porteur, comme c'est ailleurs le cas d'une Marina Abramović par exemple, de problématiques et de questionnements esthétiques, politiques et sociétaux qui le dépassent largement, et qui nous semblent coïncider dans une certaine mesure avec notre engagement.